Cette maxime, nous la connaissons tous. Elle était gravée non pas sur le fronton du temple d’Apollon à Delphes mais sur les murs du pronaos du Trésor des Athéniens, sorte de mini-temple offert par les Athéniens sur la voie sacrée qui mène au temple d’Apollon.
« Connais-toi, toi même » est au commencement de tout parcours initiatique formulée d’une manière ou d’une autre. C’en est même l’alpha et l’oméga, le but et le chemin, la fin et le moyen.
Cette injonction est commune à tous les chemins qui réellement à élever les humains dans leur humanité.
Que veut-elle dire ? Quelle consistance lui donner ?
Je me connais, je sais où j’habite, comment je m’appelle, qui sont mes parents, ma famille, mon histoire, mon origine, mes joies, mes peines, mes désirs, mes frustrations, mes espérances, mes idéaux…
Est-ce bien de cela dont il s’agit ?
En partie, mais pas en totalité car pour cela il n’est pas nécessaire d’emprunter un Chemin particulier ou choisir la stimulation d’une école ou d’une tradition comme la franc-maçonnerie ou l’alchimie.
Il s’agit de cela mais pas que. Pour se connaître soi-même, il faut apprendre à s’observer. Pour s’observer il faut se détacher, prendre du recul. Arriver à être à la fois le sujet observateur et l’objet observé. D’abord le faire hors de l’action, après coup, dans le silence et le secret de l’intimité.
Jusqu’ici, rien de nouveau, c’est assez évident.
Il nous faut aussi une grille d’observation. La science peut nous en fournir. Je suis un humain donc les lois qui me gouvernent sont propres aux humains dont certaines sont communes avec les animaux et plus largement avec tous les être vivants. Il me faut donc étudier l’humain, les animaux, les être vivants et voir comment cette science se manifeste en moi. Par exemple si on considère que les humains oscillent entre 4 grandes émotions Joie, Peur, Tristesse, Colère, l’introspection me sert à prendre conscience ce qui déclenche chaque émotion dans ma vie.
Nous ne pourrons évidemment pas collecter toutes les sciences et en comprendre toutes les subtilités, surtout quand nous ne sommes pas nous même scientifiques mais se connaître soi même passe par chercher à comprendre les fonctionnements de l’humain et les observer en nous pour mieux nous comprendre en tant qu’être vivant, animal, sapiens sapiens.
Ce n’est pas encore cela que nous trouvons sur un chemin initiatique malgré la nécessité de ce travail de se penser et s’observer comme un spécimen particulier des êtres vivants, animaux, sapiens sapiens.
Ce qui fait l’expérience initiatique c’est la découverte de soi.
Si la conscience de nos goûts et dégoûts, nos intérêts et nos défaveurs, dénis et refoulements, désirs et frustrations nous fait découvrir notre moi qui s’incarne dans la vie matérielle ce n’est pas dans cette vie là que nous ferons l’expérience du soi.
« Connais-toi, toi-même » parle de « toi ». C’est une injonction que l’on reçoit en tant qu’individualité. Le « toi » s’adresse au moi et au soi, de mon point de vue. Et aussi au « ça », c’est à dire à notre essence : une être vivant, un animal, un sapiens sapiens.
Il nous reste le soi.
Je le comprends comme faire l’expérience intime et secrète de la singularité et de l’unicité de la vie qui m’anime, moi et pas un autre, ici et pas ailleurs, maintenant et pas en un autre temps. Cette expérience se détache du vécu, de la vie matérielle, des soucis ou des joies. C’est sonder cette vie qui m’est donnée et qui m’anime. Connaître ce soi, unique et singulier par essence. Alors que le moi tire sa singularité et son unicité de son existence, c’est à dire de l’expérience matérielle : les confrontations dans le réel ; le hasard des connexions neuronales qui me font réagir aux stimuli d’une manière plutôt que d’une autre ; les réflexes ; les émotions et les comportements.
Le Soi existe quoiqu’il arrive et n’est pas soumis aux influences extérieures. Il n’a pas d’histoire. Nous en prenons conscience quand nous nous remémorons à nous-même, quand nous tentons de saisir en nous l’instant présent, quand nous nous observons vivre, être de la matière animée… Si le Moi évolue, le Soi est immuable.
« Connais-toi, toi-même » est un chemin où la connaissance du moi, du ça et du soi sont chacune nécessaires. Aucune n’est suffisante. Aucune n’est plus importante ou plus noble que les 2 autres. Pour se connaître, il est important de réaliser ces 3 travaux sur notre « toi », travail sur le moi, travail sur le ça et travail sur le soi. Rien de trop, ces travaux doivent être équilibrés.
La quête est déjà en soi infinie mais les perspectives ne s’arrêtent pas là, la maxime continue ; « Connais-toi, toi-même et tu connaîtras le Monde et les Dieux ». Je vous laisse méditer là-dessus.